Nous vivons un moment charnière pour le transport à Ottawa. La Ville a publié l’ébauche de son Plan directeur des transports (PDT), qui décrit sa vision pour le transport des gens et des marchandises jusqu’en 2046 – et le public est maintenant invité à donner son avis.
L’équipe d’EnviroCentre a examiné le plan de près et notre position est claire : l’ébauche actuelle ne va pas assez loin. La Ville s’est fixé des objectifs environnementaux ambitieux (notamment celui d’atteindre la carboneutralité d’ici 2050) et le transport durable sera essentiel pour atteindre ces objectifs. Malheureusement, le plan directeur proposé n’en fait pas assez pour transformer les habitudes de transport de la population d’Ottawa. Vous trouverez ci-dessus un résumé des éléments intéressants du plan, des éléments qui manquent et des changements que nous jugeons essentiels.
Le problème? Les émissions et les embouteillages vont augmenter
Le PDT prévoit que d’ici 2046, il y aura 1,2 million de déplacements de plus par jour à Ottawa. À moins que le plan et l’approche de la Ville ne changent en profondeur, la plupart de ces déplacements se feront en voiture, ce qui implique plus d’embouteillages, des trajets plus longs et une hausse des émissions. Les modèles prévoient que les trajets en voiture pourraient durer en moyenne 90 secondes de plus à cause de la congestion accrue. Ça semble être peu, mais pour un(e) automobiliste qui fait deux trajets par jour, ça représente 18 heures de plus par année sur la route.
Certaines personnes pensent que pour réduire la congestion, il faut bâtir plus de routes ou élargir les routes. Mais des décennies d’expérience montrent que cela ne fait qu’accroître le nombre de voitures sur les routes. Ce phénomène, qu’on appelle la demande induite, est bien documenté. (Regardez cette vidéo de 70 secondes pour en savoir plus).
La solution? Favoriser le transport durable
La seule solution viable est d’aider les gens à se déplacer plus facilement sans recourir à un véhicule individuel, en favorisant le transport en commun, le vélo, la marche et le covoiturage.
Dans son Plan officiel et son Plan directeur sur les changements climatiques, la Ville d’Ottawa s’est fixé l’objectif que 50 % de tous les déplacements sur son territoire soient effectués avec des moyens de transport durables. Malheureusement, cet objectif ne se reflète pas dans l’ébauche du PDT. Les investissements proposés — 2,2 milliards de dollars pour le transport en commun (plus 8,3 milliards qui devront être entièrement financés par d’autres paliers de gouvernement pour l’extension du train léger), 1,1 milliard pour les projets routiers, et seulement 80 millions pour les infrastructures piétonnes et cyclables — sont insuffisants.
Selon les propres estimations de la Ville, ces investissements feraient passer la part du transport durable à 48 %, soit moins que la cible de 50 %. La Ville dépenserait donc des milliards de dollars, sans même atteindre ses engagements de base en matière de durabilité.
On peut inciter les gens à choisir le transport durable – mais pas sans un plan solide
Le PDT indique que dans toutes les villes, il est difficile d’inciter les gens à opter pour le transport durable. C’est en partie vrai, mais pas entièrement. Plusieurs villes ont réalisé de belles avancées :
- Londres, au Royaume-Uni, a grandement réduit l’usage de la voiture et augmenté celui du vélo en investissant dans des infrastructures protégées, des péages routiers et des zones à faibles émissions.
- À Victoria, en Colombie-Britannique, la part du transport durable a augmenté de 7 % entre 2017 et 2023 grâce à des investissements dans les pistes cyclables et les voies piétonnières.
- Ici même à Ottawa, la part du vélo a doublé depuis 2011, grâce à l’aménagement de pistes cyclables protégées.
On peut amener les gens à choisir le transport durable, mais il faut des efforts soutenus, du financement et une volonté politique.

Qu’est-ce qui manque au Plan directeur des transports?
Le PDT reconnaît que pour atteindre les cibles de transport durable, il faudra investir davantage dans les transports en commun, les transports actifs et la gestion de la demande de mobilité, mais il ne précise pas quand, comment et si ces investissements seront réalisés.
C’est dans la présente phase du PDT que les investissements en capital sont réalisés pour financer des infrastructures comme des voies ferrées, des stations, des routes, des pistes cyclables et des trottoirs. Mais la construction d’un nouveau trottoir ou d’une nouvelle ligne de train ne signifie pas forcément que les gens changeront leurs habitudes. Pour que plus de gens adoptent le transport en commun, il faut accroître les heures de service. Mais le PDT ne prévoit pas augmenter les heures de service des transports en commun ces 20 prochaines années, malgré la croissance démographique. Il faut en faire plus pour que le transport en commun devienne une alternative fiable à la voiture.
Il est tout aussi important d’investir dans les « infrastructures immatérielles » :
- Interactions sincères et inclusives avec les résident(e)s pour comprendre leurs besoins et y répondre
- Initiatives pour informer les gens et les encourager à changer leurs habitudes
- Application réfléchie de l’objectif d’équité et d’inclusion de la Ville
- Recherche et collecte de données pour orienter les décisions
Certaines approches éprouvées permettent de favoriser le transport durable. La stratégie Évolution énergétiqued’Ottawa en identifie plusieurs : hausse de la fréquence du transport en commun rapide, zones sans voiture au centre-ville, péages de congestion, zones réservées aux véhicules électriques et hausse des tarifs de stationnement.
Certaines de ces approches sortent du cadre traditionnel d’un plan d’investissement, mais les limites ne sont pas toujours claires. Si les stationnements incitatifs sont admissibles au financement pour les dépenses en capital, pourquoi pas les systèmes de vélopartage?
C’est dans son PDT que la Ville prend la majorité de ses décisions de financement en matière de transport. Si le PDT n’inclut pas les éléments nécessaires pour atteindre les objectifs essentiels en matière de climat et d’équité, il doit être repensé. Comme le dit l’urbaniste Brent Toderian : « Ce n’est pas la vision présentée par une ville qui nous révèle ses vraies aspirations. C’est son budget. »
Le PDT est l’occasion de s’assurer que les fonds municipaux sont attribués de façon à atteindre les objectifs de la Ville et à soutenir nos communautés.
Nos recommandations
EnviroCentre recommande d’inclure ce qui suit au texte définitif du PDT, afin qu’il reflète les objectifs climatiques de la Ville et les besoins des résident(e)s d’Ottawa :
- Un engagement clair à atteindre les objectifs de la Ville en matière de transport durable
- Un financement ciblé et prévisible pour favoriser la marche, le vélo, le transport en commun et le covoiturage
- Une collecte régulière de données et des rapports transparents sur les progrès du transport durable
- Une attention accrue aux résultats en matière d’environnement et d’équité, avec une analyse claire des émissions de GES associés aux différents scénarios
- Une meilleure collaboration entre les paliers gouvernementaux pour soutenir des outils comme la tarification de la congestion et la réforme du stationnement
Notre position
EnviroCentre croit que le transport est l’un des leviers les plus puissants dont dispose Ottawa pour réduire les émissions, améliorer la qualité de vie et bâtir une ville inclusive et connectée. La version actuelle du Plan directeur des transports ne va pas assez loin pour concrétiser une véritable transition vers le transport durable.
Nous demandons au personnel de la Ville et au Conseil municipal d’améliorer le plan — et de le soutenir avec le financement, les services et les politiques nécessaires pour atteindre nos objectifs en matière d’environnement et d’équité.
Comme EnviroCentre, vous pouvez présenter vos commentaires sur le PDT!
Voici comment procéder :
- Répondez au sondage de Participons Ottawa d’ici le 12 mai
- Envoyez un courriel à votre conseiller municipal ou au maire pour les inviter à s’engager à atteindre les cibles de transport durable. Le vote final du conseil municipal devrait avoir lieu le 9 juillet, alors écrivez-leur sans tarder pour influencer le résultat.
Auteure : Cassie Smith, Responsable stratégique, Transport durable